29.05.2025 – France Inter “La Terre au carré”
Dans les dix dernières minutes de l’émission, Thibaut Sardier de Libération évoque la consultation de l’aéroport Charles-de-Gaulle sur son avenir et sa mue écologique… tout en accompagnant une hausse du trafic aérien.
Ecouter l’émission :
Je vous parle du premier aéroport de l’Union européenne en nombre de passagers – Roissy Charles de Gaulle, évidemment – car vous pouvez décider de son avenir.
Aéroports de Paris a lancé une grande consultation sur l’aménagement futur de l’aéroport, avec des réunions d’informations, des ateliers et une enquête en ligne ouverte à tous. Vous et moi pouvons dire ce que nous pensons de la “vision stratégique” de l’entreprise. Une vision qui fleure bon la transition écologique, avec une meilleure connexion au train, des énergies bas carbone, ou de l’immobilier durable.
Voilà qui ferait rêver plus d’un zadiste : pouvoir verdir un aéroport, voire s’opposer d’un clic au trafic aérien ? Le rêve.
…qui devient réalité ?
Évidemment non ! Car un impératif s’impose : il faut « répondre à la demande de trafic »… en hausse. Hausse modérée nous dit ADP, à peine 1 à 1,5% par an, alors qu’avant Covid, on tablait plutôt sur 2,5 à 3%. A l’époque, l’entreprise rêvait d’un quatrième grand terminal, qui a depuis été abandonné.
Mais ce petit pourcentage n’est pas anodin. D’ici 2050, cela représente une augmentation de 19% des mouvements d’avion et de 38% du nombre de passagers par rapport à 2019, pour un total de 105 millions de voyageurs par an.
Hier, Justine Coutard, la directrice générale déléguée m’expliquait que le transport aérien, c’est la mission de service public de l’entreprise, et qu’il est donc hors de question de ne pas suivre la demande, ce qui limite pas mal le champ des possibles. Le discours est qu’il est possible de sauver les avions et la planète en même temps. Une position évidemment loin de faire consensus : en 2022 le rapport « Voyager bas carbone » du Shift Project n’y allait pas par 4 chemins : pour remplir ses objectifs écologiques, la France doit faire baisser le trafic aérien.
Il y aura donc probablement de nouvelles salles d’embarquement. La nouveauté, c’est que le projet est annoncé comme modulable : l’aéroport grandira en fonction du trafic effectif. Et on nous promet une diminution des émissions de gaz à effet de serre.
D’un côté, il y a le plus facile : la neutralité carbone au sol, dans l’aéroport, pour laquelle beaucoup de choses sont prévues. De l’autre, la baisse des émissions en vol. C’est le gros du problème, et le plus dur. La vision stratégique parle d’avions nouvelle génération (un renouvellement qui prendra du temps), de biocarburants (qu’il faudra pouvoir produire en assez grande quantité) et de moteurs à hydrogène (technologie qui peine à faire ses preuves). Là aussi, pas sûr que le rêve devienne réalité.
Cette consultation va-t-elle servir à quelque chose ?
Les associations de riverains mobilisés contre l’aéroport n’y croient pas puisque l’entreprise n’a pas l’obligation de tenir compte des résultats.. La présidente de l’une de ces assos, l’ADVOCNAR, pointe l’impossibilité de questionner l’augmentation du trafic. Des efforts sont faits sur la réduction du bruit, mais plus de passages d’avion, c’est forcément plus de nuisances, dit-elle.
Par ailleurs, certaines questions semblent moins servir à discuter le projet qu’à susciter de l’adhésion. Quand on vous demande : voulez-vous développer les pistes cyclables à Roissy, ou installer un métro pour faciliter les correspondances ? Vous me répondez forcément… Oui !
Mais il faut souligner que d’autres questions sont plus lourdes de conséquences. On peut se prononcer sur le projet dans son ensemble, de très favorable à très défavorable : voilà une question qui semble déjà plus intéressante.
Chez ADP, on m’a bien expliqué qu’une consultation n’était pas un référendum, mais on promet que les avis exprimés compteront dans le projet final. Alors rien n’interdit d’aller se renseigner et donner son avis sur le futur de l’aéroport, vous avez jusqu’au 8 juillet.